ARTICLE | 24/06/2006 | Numéro 1484 | Par Père Alain Bandelier
«Dans vos chroniques, quand vous évoquez la prière universelle, vous semblez plutôt critique. Quel est le sens de cette prière ? Comment rédiger les intentions ?»
La restauration de l’oratio fidelium (prière des fidèles) dans la liturgie de la messe a été une décision importante du concile Vatican II. Sa place dans la célébration n’est pas due au hasard. On vient de lire la Parole de Dieu, l’homélie a eu le souci de l’actualiser, le silence a permis de l’intérioriser. Il faut maintenant répondre à cette Parole.
Une première réponse est la profession de foi : par le Credo, l’assemblée dit son adhésion au message entendu. Mais la Parole entendue doit devenir Parole vécue, en nous et dans le monde. Cela appelle notre conversion et notre engagement. Mais d’abord notre prière. Dans la prière en effet nous nous ouvrons à l’Esprit Saint, qui nous donne la lumière pour reconnaître ce que Dieu désire et la force pour l’accomplir.
On appelle cette prière la «prière universelle» : ce n’est pas le moment de se replier sur des préoccupations personnelles, mais plutôt de s’ouvrir aux intentions de l’Église, aux besoins du monde, à la détresse de ceux qui souffrent, sans oublier de prier pour la communauté locale (mais sans non plus s’y enfermer : une seule intention lui sera consacrée). Tels sont les quatre thèmes habituels de la prière (des variantes sont possibles pour tenir compte d’une circonstance particulière).
Nous prions au pluriel : au-delà de la communauté présente, petite ou grande, c’est le « nous » ecclésial qui s’exprime. «Exerçant notre sacerdoce de baptisés, nous offrons à Dieu des prières pour le salut de tous les hommes» (1). Nous prenons ainsi notre part de la prière incessante dont l’Église enveloppe ce monde, afin de le rendre perméable à la grâce de Dieu.
(…) C’est la communauté qui parle, même si les intentions sont préparées par un petit groupe et si elles sont lues par une seule personne (la lecture à plusieurs voix me semble cependant plus conforme à l’esprit de cette prière ; n’en faisons pas une lecture supplémentaire) : «L’assemblée exprime sa prière soit par une invocation commune après chaque intention, soit en priant en silence» (2).
Il y a des risques, évidemment : la formule stéréotypée si peu priante, la phrase inextricable qui veut dire trente-six choses à la fois, la méditation planante qui n’en finit pas, le discours culpabilisant déguisé en prière, le moralisme bien-pensant, le copié-collé des infos de la semaine. À cela le Missel romain répond : «Les intentions proposées seront sobres, composées avec une sage liberté et en peu de mots» (2).
Il y a deux moyens simples de renouveler cet usage. Le premier est de s’inspirer des oraisons latines, qui commencent par contempler le Seigneur avant de lui demander quelque chose ; cela rejoint le conseil de saint Paul : «Dans l’action de grâce, présentez à Dieu vos demandes». Le deuxième est de reprendre la Parole de Dieu proclamée dans la liturgie ; c’est une mine inépuisable : on relit une phrase et, comme en écho, on énonce une intention de prière.
Mais le meilleur conseil à donner c’est : avant de composer une prière, commencez par prier.
(1) Présentation générale du Missel romain, n° 69. (2) Ibid.